Mickael Hilpron :" le judo est une recherche "
Judo : les actualités du judo en France et dans le monde / Interview / mercredi 24 juin 2009 / source : alljudo.net
Judoka 1e division et étudiant en doctorat, le parcours de Mickael Hilpron a de quoi susciter l’intérêt. Pour alljudo il évoque le sujet de son doctorat, étroitement lié à son séjour à Tenri (Japon).
Bonjour Mickael, est-ce que tu peux nous retracer ton parcours scolaire et sportif ?
J’ai passé le bac à la Martinique en 2000, avant de rejoindre Orléans ou j’ai intégré une filière Staps. Durant mon Master j’ai eu l’occasion, en 2005, de partir un an à Tenri au Japon, où je me suis entraîné, et ou j’ai étudié le système et le fonctionnement du judo japonais. A mon retour en France j’ai terminé mon Master et depuis mars 2007, je suis en Doctorat.
Concernant le judo, j’ai été 3e des championnats de France Universitaires en 2002, 2004 et 2006. Depuis 2007 je me suis qualifié trois fois de suite pour les championnats de France 1e division en moins de 73 kg.
Quel est le sujet de ton doctorat ?
J’utilise la méthode ethnographique pour mener une analyse comparative entre la méthode japonaise et de la méthode française. Il est très important de préciser que le but n’est pas de hiérarchiser, mais bien de comparer en faisant ressortir les différences et les points communs.
Justement que ressort-il de cette comparaison entre le système français et le système japonais ?
Tout d’abord, les Japonais fonctionnent avec une culture de groupe. A Tenri, le premier objectif c’est d’être champion du Japon par équipes, puis de former des champions en individuel. Former des champions n’est qu’une conséquence de l’objectif de groupe. Les professeurs comme Shinohara, Fuji, Hosokawa, qui sont tous d’anciens champions formés à Tenri, sont imprégnés de cette culture.
En France, contrairement au Japon, nous fonctionnons avec un système pyramidal, et la démarche est individuelle. Chaque judoka veut avoir des résultats pour rentrer en Pôle, puis à l’Inef, puis à l’Insep.
Et concernant l’entraînement ?
A Tenri l’entraînement est toujours le même, à savoir 90 minutes de randori sans pause. Cela peut être 15x6’ ou 13x7’, et parfois les temps de randoris sont libres, ainsi on peut rester une heure à faire randori avec le même partenaire. Cela engendre un rythme de combat plus lent, mais Il y a énormément d’intensité car le combat est moins haché, avec moins de bagarre sur les mains.
En France les temps de combats sont plus courts, avec de la récupération, et à l’approche de la compétition, on les raccourci encore pour augmenter l’intensité.
En ce qui concerne le travail physique (footing, musculation) c’est assez semblable. Les Japonais se sont beaucoup inspirés de ce que faisaient les Européens dans ce domaine.
Tu n’as pas évoqué le travail technique ?
Au Japon, il n’y a pas de travail technique tel qu’on le conçoit avec des explications et des démonstrations. Ils font uchikomi et randori. Un jour à Tenri, j’ai demandé à Hosokawa Sensei de m’apprendre o-soto-gari. Il m’a envoyé faire randori avec un combattant qui m’a projeté trois-quatre fois sur o-soto-gari avec des préparations différentes. En revanche, lorsqu’ils font uchikomi c’est un vrai travail technique : la précision et la dimension esthétique du mouvement sont plus importantes que la vitesse, ils sont très relâchés, et on sent qu’ils explosent à chaque répétition. En France le travail d’uchikomi s’apparente plus à travail musculaire, ou les athlètes sont toujours en contraction.
As-tu pu faire un comparatif au niveau des enfants ?
Non malheureusement je n’ai pas pu le faire, même si j’ai glané quelques informations. Apparemment ils n’ont pas d’approche particulière pour les enfants, et la notion même de pédagogie leur est étrangère.
A l’issue de ta thèse que comptes-tu faire ?
Je souhaite retourner à la Martinique, puis je verrais en fonction des opportunités. L’un des projets qui me tient à cœur serait d’ouvrir mon propre club, pour enseigner le judo d’une manière différente de ce qui existe déjà, pour développer mes propres méthodes.
Ton avenir c’est plutôt le judo ou la recherche ?
Le judo est une recherche, c’est ce qu’exprime le ‘do’ de judo. Au Japon Hosokawa Sensei ne porte pas la ceinture rouge et blanche car il dit se sentir élève. Pour lui il y a trois stades dans le judo : faire avec les autres, c’est l’apprentissage, faire contre les autres, c’est la compétition, et faire pour les autres c’est l’enseignement. Mon objectif est de suivre cette évolution.
Mickael tient à remercier le Conseil Régional de la Martinique pour le soutien qu'il lui prodigue à travers la Bourse Doctorale Régionale qui lui a été accordée.
le CV de Mickael Hilpron
Reportage TV sur le travail de Mickael Hilpron : rythmes du judo et du danmye