Serge Dyot : « 75% de la réussite c’est le mental »

Judo : les actualités du judo en France et dans le monde / Interview / lundi 6 octobre 2008 / source : alljudo.net


La réussite de ses athlètes aux J.O., les remaniements au sein du Lagardère Paris Racing ou la place des clubs dans la formation des athlètes de haut-niveau, Serge Dyot évoque ces différents sujets pour alljudo.net. Interview.

Trois des quatre judokas français médaillés à Pékin, sont au Lagardère Paris Racing, qu’est-ce que cela vous inspire ?
Globalement cela m’inspire beaucoup de bonheur. Ensuite trois émotions différentes. Une tristesse inouïe pour Lucie. Je ne suis pas déçu, je suis triste, car tout ce qu’on avait préparé s’est écroulé sur un mouvement d’une beauté extraordinaire, et sur lequel il n’y a vraiment rien à dire. Pour Stéphanie je ressens une grande émotion. Elle n’était pas du tout dans sa compétition lors de ses trois premiers combats, puis durant la pause elle venue nous voir, sa sœur et moi. J’ai été très sévère avec elle, j’ai eu des mots durs, et derrière il y a la réussite. J’ai été très ému, au point que j’ai eu besoin de m’isoler un moment après sa victoire pour la médaille de bronze. Enfin concernant Teddy, c’est devenu un soulagement en cours de journée. Il n’aurait jamais du perdre face à Tangriev. Je regrette vraiment de ne pas avoir eu accès à mes athlètes, car malgré tout il ne perd que de shido.

La France n’a plus remporté de titre olympique depuis 2000. Que manque-t-il à nos judokas ?
Je pense que nous sommes sur la bonne voie. On avait deux possibilités importantes avec Lucie et Teddy. Tout le monde les voyait champions olympiques, surtout Lucie, et ils échouent de très peu. Aux J.O. chacun joue sa vie, comme l’Algérien Benikhlef, qui aurait pu gagner la finale des moins de 90 kg. Peut-être que nous pêchons encore au niveau mental. Lorsque je voie Matthieu Dafreville et Dimitri Dragin échouer à partir des demi-finales, je ne pense que cela vienne de la préparation, c’est plutôt la capacité à élever son niveau lors des moments importants. A ce niveau, 75% de la réussite c’est le mental.

La saison du Lagardère Paris Racing a débuté avec un remaniement au niveau du staff. Etiez vous trop d’entraîneurs ou y avait-il des incompatibilités de personnes ?
Un peu des deux, mais même si j’ai un avis sur la question il vaudrait mieux que vous la pausiez à Thierry Rey, le président du L.P.R.

Un mot à propos de l’arrivée de Bernard Tchoullouyan.
Il travaillait déjà avec Lucie et nous allons former une vraie équipe. Lui est très attaché à la technique et moi j’interviens beaucoup sur le mental. Nous avons la même conception, nous voulons accompagner des jeunes judokas au plus haut niveau international.

Cette année vous n’avez pas recruté de garçons et plusieurs sont partis. Quelle est l’explication à cela ?
Nous n’avons pas vocation à recruter des athlètes qui sont déjà au plus haut niveau mondial. Bernard Tchoullouyan est également dans cette optique. Ensuite ceux qui sont partis n’ont peut-être pas trouvé l’osmose qu’ils attendaient, et ils étaient plus liés à Waldemar Legien, ou à Thierry Dibert, qu’à moi-même.

Sachant que le haut-niveau est géré au sein des structures fédérales, qu’elle est la place pour l’entraînement de club ?
C’est très court. Nous proposons des séances techniques tous les matins. Il y a également des entraînements plus classiques le soir avec des randoris, des uchikomis. Mais ce travail là, les athlètes l’effectuent essentiellement au sein des structures. Au club ils se réunissent le mercredi soir, c’est le seul moment où nous pouvons intervenir sur les randoris. Maintenant la collaboration avec les structures fédérales se passe bien. Dans les clubs nous intervenons surtout sur la technique et sur le mental.

Vous êtes un entraîneur qui attache une très grande place au mental. Quel est votre mode de fonctionnement avec les athlètes ?
Je pense effectivement que le mental tient une part très importante. Sur un mot on peut changer les choses. Sur la chaise, il faut trouver le bon mot, voir ce que l’athlète ne voit pas et lui donner les bonnes indications. Je préfère intervenir durant le « matte »,car pendant le combat les athlètes n’entendent pas forcément les consignes, il faut alors communiquer avec des gestes. L’exemple typique d’un combat où l’on aurait pu changer les choses, c’est celui entre Teddy Riner et Tangriev. C’est dans ces moments là que le coach doit trouver la solution, quand l’athlète est perdu. Dans ce cas précis il fallait changer de stratégie en cours de combat, plusieurs fois si nécessaire. De manière plus générale, j’ai besoin de bien connaître les athlètes, leur vie, leur caractère, leurs comportements, de manière à savoir comment les faire réagir.

Quel est votre sentiment sur le nouveau règlement que la France va expérimenter cette saison ?
Il y a beaucoup d’éléments positifs, car on va essayer de privilégier le judo, et cela devrait être plus difficile pour ceux qui essayent de truquer. Il y a un regret que j’ai, c’est que l’on ne se soit pas pencher sur la notion de continuité dans l’attaque. On voit des actions qui sont comptées ippon alors que le premier impact est sur le côté ou sur les fesses. Lors de la finale olympique entre Wang et Mammadli aux J.O. , Wang fait un tour et demi et atterri sur le côté, mais l’arbitre compte ippon, pour moi il y a yuko. Je suis favorable à ce que l’on revienne à la notion d’impact.



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