Quand Emilie rime avec Teddy

Judo : les actualités du judo en France et dans le monde / Article / samedi 13 aout 2016 / source : alljudo


Emilie Andéol est devenue à la surprise quasi-générale championne olympique des +78kg, tandis que Teddy Riner s'offrait un deuxième sacre olympique en +100kg. Une journée historique pour le judo français.

Cinquième des mondiaux 2013, troisième en 2014, éliminée au premier tour en 2015 par la Japonaise Tachimoto, Emilie Andéol a repris sa marche en avant en allant chercher la plus belle des médailles, celle de l'or olympique.

Pas favorite et avec un tableau très difficile, la combattante de Champigny, a su monter en puissance tour après tour, et elle a battu successivement la Mexicaine Zambotti (n°23), la Tunisienne Cheikh Rouhou (n°4), la Chinoise Yu (n°2) et la Cubaine Ortiz (n°1). Une revue d'effectif complète des meilleures mondiales.

Le 1e tour contre la Mexicaine Zambotti se jouait aux pénalités durant le golden score. La Mexicaine dominait légèrement en multipliant les attaques à genou, mais l'arbitre ne tombait pas dans le panneau et Zambotti était pénalisée pour fausse attaque. Un succès un peu heureux au regard de la façon dont d'autres Français ont été arbitrés durant la semaine, mais un bon électrochoc pour Andéol, passée tout près d'une élimination au premier tour.

Le scénario du deuxième tour contre la Tunisienne Cheikh Rouhou, allait être assez semblable. Shido pour la Tunisienne pour une fausse attaque durant le golden score. En même temps qu'elle se qualifiait pour les demi-finales, Andéol donnait des signes positifs dans l'attitude.

Sa deuxième partie de journée sera d'un tout autre calibre. Habitée de cette petite flamme que l'on avait vu la veille dans le regard de Kayla Harrison ou de Lukas Krpalek, ne lâchant rien sur les mains, mobile, attaquant dès que l'occasion lui en était donnée, elle poussait la Chinoise à la faute. Yu se lançait dans un yoko-guruma approximatif, Andéol fauchait sur o-uchi-gari. L'arbitre lui-même n'en croyait pas ses yeux, et il fallait une intervention de la table pour qu'il annonce l'incroyable ippon.

La finale contre la tenante du titre, la Cubaine Ortiz, était de la même veine. Progressivement la Française s'imposait comme la patronne, entamant la confiance de la double championne du monde. Le début du golden score était symptomatique, c'est la Française qui faisait le combat. Dépassée, Ortiz tentait un contre maladroit, Andeol gardait sa jambe en crochetage en o-uchi-gari, mais faute de contrôler avec les mains, elle ne marquait pas. Qu'à cela ne tienne, elle enchaînait rapidement et elle immobilisait la Cubaine. Les secondes qui s'égrainaient étaient celles d'un bonheur pur, d'un moment d'émotion comme seule le sport peut nous en procurer.

En deux combats, la double championne d'Europe est entrée dans la légende du judo français et à jamais dans le cœur des amateurs de judo.

Journée difficile pour Teddy Riner
Porte-drapeau de la délégation française, objet de nombreux reportages télé dont un prime-time de 52 minutes sur Canal+, invaincu depuis 2010, Teddy Riner n'avait pas d'autre option que de gagner. Si l'on ajoute à cela que l'octuple champion du monde rêvait de gagner avec la manière, et que ces adversaires s'étaient tous préparés pour le battre, on peut dire sans galvauder ce terme, que le géant français avait une incroyable pression sur les épaules.

On rêvait de voir ses attaques de jambes fulgurantes et percutantes. On rêvait d'un Riner mobile et inspiré. On aura vu un Riner efficace. Une implacable machine à gagner. Après avoir dominé facilement l'Algérien Tayeb, wazari sur un mouvement de hanche enchainé en osae-komi, Riner débutait son combat contre le Brésilien Silva avec des intentions techniques, mais le Brésilien empêchait par tous les moyens le Français de poser les mains, s'en remettant même à curieuse saisie sur le bas de la veste, qui n'avait pas d'autre but que de gêner le Français. Riner fermait à son tour le jeu, durcissait sur les mains et sortait son curieux sumi-gaeshi pour marquer wazari.

La demi-finale attendue contre l'Israelien Sasson allait être d'une intensité encore supérieure. L'Israelien ne lâchait rien, et même s'il souffrait face à la puissance et l'allonge du Français, il trouvait l'ouverture pour passer sous le centre de gravité de Riner et pour commencer à le remonter sur seoi-nage. Heureusement Riner avait réagi et il s'en tirait avec un bel atterrissage sur le front. L'Israelien venait de laisser passer sa chance de réaliser un immense exploit. On s'acheminait vers le golden score, mais Riner intensifiait sa pression au kumi-kata, il obligeait Sasson à courber l'échine, et il l'enroulait sur sumi-gaeshi bien maîtrisé, quasiment sur le gong.

En finale, il retrouvait logiquement Harasawa, le jeune lourd japonais que Riner n'a encore jamais rencontré. Le combat se passait uniquement sur les mains, et, après avoir décalé les pénalités en sa faveur, Riner assurait le coup et ne prenait aucun risque. Pour le spectacle on repassera, mais Riner n'avait pas les moyens sur ce championnat de faire mieux. Sans doute aussi soulagé qu'heureux, le Français a évoqué dès sa descente du tapis, son besoin de repos avant de pouvoir envisagé de nouveaux objectifs.

A 27 ans, avec huit titres mondiaux et deux titres olympiques dans la musette, le judoka de Levallois, peut se permettre un gros break. Son corps a montré des signes de fatigue sur cette dernière olympiade, et il est clair que sur la journée d'hier il a dû puiser loin dans ses ressources mentales.

S'éloigner un temps des tatamis, pour mieux revenir, avec comme point de mire Tokyo 2020, cela peut-être une solution pour le Guadeloupéen qui, s'il est invincible n'est pas éternel, et sera trentenaire dans quatre ans.

 


Résultats des épreuves de judo Jeux Olympiques 2016

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